Katarina Taikon et le Premier ministre Tage Erlander

La lutte
pour le droit fondamental à l’éducation

« L’Association pour les Tsiganes » réunit un petit groupe d’activistes autour de Rosa et Katarina. En 1964, l’association met en place un cours d’alphabétisation dont huit adultes sont les premiers bénéficiaires. À l’issue de cette formation de plusieurs semaines, qui fait appel à des méthodes pédagogiques innovantes, les résultats sont spectaculaires. Les arguments des politiques et de certains « experts », selon lesquels les « Tsiganes ne sont pas motivés par les études… » sont battus en brèche. Le groupe d’étudiants demande à poursuivre sa formation mais les subventions nécessaires sont refusées. Une série de manifestations est alors organisée, ainsi qu’une campagne d’informations, articles de presse, distribution de tracts sur la voie publique. Grace à cette mobilisation, le groupe est reçu par le Premier ministre Tage Erlander. Dès le lendemain la photo de cette entrevue est publiée dans les plus grands journaux nationaux. Elle a une valeur symbolique car c’est la première fois qu’une délégation rom est amenée à dialoguer directement avec les autorités au plus haut niveau.
1964 – la délégation menée par Katarina Taikon est reçue par le premier ministre Tage Erlander-photo Bjorn Langhammer
L’année suivante dix écoles pour adultes sont ouvertes à travers le pays. Katarina donne des conférences, écrit des articles, rencontre de nombreux interlocuteurs pour poursuivre sur cette avancée. C’est dans ce but qu’en 1965, une manifestation est organisée. Sur les banderoles on peut lire : « Investissez dans l’éducation pour adultes ! »

Le soutien est massif. À l’issue de ces démarches le programme est pleinement intégré au cadre de l’éducation nationale. C’est une victoire et une reconnaissance du combat mené par les activistes depuis plusieurs années dans la lignée des actions de J.Dimitri.Taikon qui dans les années 30 ouvrit la voie pour réclamer le droit à l’éducation des enfants roms en Suède.

Manifestation du 1er mai 1965. Sur les banderoles on peut lire : « Investissez dans l’éducation pour adultes ! » photo Bjorn Langhammer
En décembre 1966, Martin Luther King qui vient de recevoir le prix Nobel de la paix est à Stockholm, à l’invitation de l’Association des Jeunes pour la Paix. Cette même année, Katarina est la première lauréate du prix créé par l’Association, pour son combat pour les droits civils des Roms. Le soir du meeting, Katarina se tient à la tribune aux côtés Martin Luther King. Dans les années 1960, aussi bien dans les discours publics que dans la presse la Suède est présentée comme un pays exempt de problèmes minoritaires et de racisme. Pourtant les familles roms continuent d’être confrontées à des discriminations, dans le domaine du logement et par conséquent dans celui de la scolarisation des enfants, alors qu’ils sont des citoyens suédois. Le racisme idéologique est nié mais l’ostracisme à l’égard des Roms est bien réel.
Martin Luther King et Katarina Taikon, Stockholm, décembre 1969 – photo Anders Thunqvist